Reproduction du courrier adressé à Voie Prolétarienne (20/04/2017)

À l'intention de Voie Prolétarienne

Objet : annulation de la participation de VP à la réunion commune prévue le 20 avril 2017 à Paris 8

Suite à la décision de Voie Prolétarienne de ne pas s'associer à la Plateforme 2016 en vue de la réunion publique qui se tiendra à Paris VIII à l'occasion des prochaines présidentielles, nous tenions à dissiper un certain nombre de malentendus. La mise au point que voici a été soumise au vote le mercredi 19 avril 2017.

• Plateforme 2016 est une organisation politique que nous avons créée à l'occasion du mouvement contre la loi El Khomri dans le cadre de la commission Programme et Perspectives des Nuits Debout, place de la République à Paris. Son programme, tel qu'il se présente, est l'expression et la traduction des propositions qui ont émergé au cours des assemblées que nous avons organisées. La Plateforme est, comme telle, indépendante de toute autre formation politique. C'est dans le cadre de nos réunions hebdomadaires que se décident nos actions et nos propositions, en anticipation de la démocratie directe et impérative que nous visons.
• Dans cette mesure, le contenu politique de la Plateforme doit être trouvé dans notre programme. Nous ne nous reconnaissons aucune autre allégeance, de parti ou d'idéologie. Nous travaillons à la construction d'une alternative au capitalisme, c'est-à-dire à la domination d'une classe par une autre, à l'exploitation de l'homme par l'homme.

Le programme, tel qu'il existe, n'est ni exhaustif, ni définitif. Ceci étant, nous pouvons d'ores et déjà indiquer que si nous voulons révolutionner le mode de production capitaliste, c'est en vue de la construction d'une société égalitaire dans laquelle le plus libre développement de chacun soit la condition du plus libre développement de tous. Dans cette mesure, nous cherchons à penser et à combattre toutes les formes d'oppression, qu’elles soient de sexe, de genre, de race, ou de sexualité. Par conséquent, nous n'opposons pas la question culturelle à la question sociale comme si elles faisaient alternative; nous ne réduisons pas non plus la question de l’oppression à celle de l'exploitation comme si la première était l'expression ou la conséquence nécessaire de la seconde. Nous cherchons plutôt à penser les systèmes de domination dans leurs spécificités comme dans leur articulation. Si développer une position pratique et théorique sur ce sujet ne peut se résumer en quelques lignes, voici tout de même ce qu’est notre point de vue de classe sur ce que vit, en plus de l’exploitation par le travail salarié, une partie du prolétariat, et que nous définissons comme oppressions :

• de sexualité : la Plateforme non seulement combat l'oppression spécifique dont les personnes LGBT font l'objet, dénonce toute inégalité, notamment juridique, fondée sur la considération de l'orientation sexuelle mais conçoit les normes sexuelles, c'est-à-dire l'hétérosexualité obligatoire et la hiérarchisation des sexualités qui la fonde, comme des constructions sociales et politiques auxquelles elle oppose la nécessité de leur déconstruction. Nous chercherons, à cette fin, à organiser les résistances LGBT prolétariennes dans les comités de travailleurs que nous constituons.
• de sexe : de la même façon, et au nom des mêmes principes, la Plateforme dénonce et combat la hiérarchisation des sexes. Nous combattons les inégalités salariales entre les hommes et les femmes, les violences conjugales, le harcèlement sexuel, dans lesquels nous reconnaissons l'effet du système de genre, des représentations imposées par une minorité dominante qui en a les moyens à la majorité de la société, et reproduites à des degrés divers dans le prolétariat selon son état d’avancement et de conscience révolutionnaire.
• de genre : nous dénonçons la médicalisation des procédures de changement de sexe et la pathologisation des personnes trans. Ces représentations participent à la stigmatisation des personnes transgenre, gagées sur le système sexe-genre qui réduit le genre au sexe biologique. Nous revendiquons, au contraire, pour toute personne le droit à l'auto-détermination de son genre.
• de race : nous dénonçons le chantage à l'intégration, le mythe bourgeois des valeurs nationales qui veut dissoudre la réalité de la lutte des classes tout en légitimant l’impérialisme universaliste, le traitement différencié, les discriminations à l'embauche et au logement, le harcèlement policier, comme l'instrumentalisation raciste de la laïcité et du féminisme.

De façon générale, nous reconnaissons comme nos frères et soeurs tous ceux qui subissent l'exploitation, l'oppression, les formes variées d'assujettissement. Nous rejetons les dégénérescence bourgeoise de certains mouvements antiracistes, féministes et autres, qui nient l’hétérogénéité de ces groupes, alors qu’on y trouve à la fois des patrons et des prolétaires. Ces mouvements bourgeois ou mainstream nient l’inter-sectionnalité entre l'exploitation économique et les oppressions culturelles, comme par exemple le terreau que représente l’exclusion sociale et la marchandisation des rapports entre individus, entraînant l'exploitation sexuelle, la marchandisation des corps, la frustration sexuelle et le sexisme dans le prolétariat. De même que l'exclusion sociale d'une partie de l'immigration post-coloniale et de ses descendants ne peut se résumer à une question culturelle mais bien à la place de ces individus dans la machine de production, place qu'ils partagent avec des prolétaires blancs, et dont l'idéologie dominante et la concurrence entre misérables veut les séparer en exacerbant racisme et repli communautaire.
Nous considérons comme nuisible et aliénante toute domination d'un groupe sur un autre : des capitalistes sur les prolétaires, des hommes sur les femmes, des hétéros sur les homos, des blancs sur les non-blancs. Seul un point de vue de classe, prolétarien, sur ces sujets peut permettre l’émancipation de tous. Ainsi nous nous accordons sur une même stratégie de conquête de la liberté, par la mise en place de contre-pouvoirs organisés des travailleurs et privés d’emplois, par le développement des liens d'entraide et de solidarité de tous les exploités et de tous les opprimés.

Pour Plateforme2016,
ses membres réunies à Paris le 19 avril 2017

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